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Wash <wash@ecn.org>
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Date
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Wed, 16 May 2001 15:53:31 +0200
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Subject
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globe_l: Macédoine : le dernier train
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Koha Ditore
7 mai 2001
(Traduit par Mandi Gueguen)
Le dernier train
Par Shkelzen Maliqi (publiciste et chef de la correspondance de Radio
Evropa
e Lire [Radio Free Europe], à Pristina)
Les événements en Macédoine prennent une étrange tournure. Cet État
fragile
se trouve à un carrefour historique, face à une grande catastrophe
autodestructrice. La spirale des conflits, après un cessez-le-feu qui a
duré
quelques semaines, avait pris la direction d'une grande confrontation,
où le
gouvernement était prêt à déclarer l'état de guerre. Certains faucons,
au
gouvernement et dans l'opposition, pensant que tous les maux de la
Macédoine
venaient du Kosovo, ont même proposé de poursuivre la guérilla albanaise
au-delà de la frontière, c'est à dire à l'intérieur du territoire du
Kosovo.
Ils imaginent la Macédoine comme une puissance militaire qui peut se
comparer à celle de la Turquie, laquelle bien souvent, a poursuivi les
guérilleros kurdes au-delà de sa frontière, dans les territoires
irakiens et
syriens.
C'est une pure folie et une myopie de leur part, car on ne peut pas
accepter
que les querelles de la Macédoine soient intérieures, et héritées de la
longue exploitation et marginalisation des Albanais de la Macédoine. En
fin
de compte, et ceci sous la forte pression de l'OTAN et de l'Europe, les
facteurs politiques de la Macédoine, en collaboration avec les forces
politiques albanaises, ont fait des concessions et ont décidé d'offrir
une
plate-forme pour le dépassement politique de la crise.
On est arrivé à un accord pour la création de la grande coalition, avec
tous
les partis importants, du côté macédonien comme du côté albanais, de
manière
à ce que la solution des problèmes soit canalisée vers les institutions
légales de l'État. On a déjà pu le faire à la fin du premier cycle des
conflits, mais un triomphalisme illusoire de victoire s'est accaparé du
côté
macédonien, après le cessez-le-feu déclaré par l'UÇK, et la vieille
rengaine
des conditionnements et du blocage des processus qui feraient avancer
les
processus politiques émancipateurs alla bon train.
On peut saluer l'institutionnalisation des dispositifs en vue du
dépassement
de la crise, comme une dernière tentation pour éviter que les conflits
et la
catastrophe perdurent. Or, une question essentielle se pose : est-ce
qu'on
s'y est pris peut-être un peu tard? N'aurait-on pas dépassé le seuil de
la
patience et de la partition ethnique, alors que les extrêmes en vérité,
sont
devenus quasiment incontrôlables? Ce n'est pas juste l'UÇK qui est mis
en
cause, qui se considère comme un facteur inévitable dans les
négociations
(l'accord des partis, apparemment ne prend pas en considération
l'implication de l'UÇK dans les discussions), mais l'extrémisme
macédonien
aussi, qui entre-temps a commencé à entreprendre des actions
vindicatives
envers les Albanais, en prétendant qu'il a derrière lui de considérables
forces paramilitaires.
Le gouvernement de la grande coalition apparaît pour le moment comme une
solution imposée par les étrangers plutôt que comme une entreprise en
laquelle les citoyens pourront avoir confiance. Les grandes épreuves
seront
conditionnées par le contrôle des forces extrémistes, pour lesquelles ce
gouvernement n'est pas garant d'un processus salvateur. Son problème
principal sera une fois de plus le temps dont il dispose, car d'une part
l'extrémisme albanais, pour interrompre les conflits, demande les
solutions
les plus rapides, alors que celui macédonien réagira sur toute
«concession»
accordée aux Albanais et qui à leur avis nuit «aux intérêts de la
nation».
Le fait même que le changement de la constitution et les autres
dispositions
politiques soient prévus pour novembre prochain, soit dans six mois,
montre
que le gouvernement de la grande coalition a envisagé un temps assez
long
pour la réalisation du projet, en craignant peut-être un danger venant
plus
des extrémistes macédoniens que des extrémistes albanais.
Pendant ces six mois, l'UÇK sera dans une position délicate, car après
ce
qui c'est passé ces deux derniers mois, ces forces ont perdu la
confiance
dans les facteurs politiques albanais ou macédoniens. Entre-temps, il
est
clair que pour le moment la clef du dépassement de la crise est entre
les
mains de l'UÇK.
Le dilemme qui s'étend dans les montagnes de Karadak et de Shari et dans
les
centres qui aident les forces rebelles, est de savoir si l'UÇK doit
abandonner les actions militaires futures, en laissant la place aux
leaders
politiques pour résoudre les problèmes évidents et connus, et aussi la
scène
internationale, ou s'il doit persister dans la pression militaire
jusqu'à ce
qu'il ne se légitime, lui-même, comme le plus digne négociateur pour
représenter les intérêts albanais?
D'autre part, le dilemme de la population civile albanaise est celui-ci
:
est-ce que la promotion et la légalisation de l'UÇK et la promotion et
la
légalisation de l'intérêt albanais en Macédoine sont sur la même échelle
de
valeurs? On sait que les revendications des rebelles ne diffèrent pas
radicalement de celles des partis politiques, et l'UÇK ne doute que sur
les
moyens politiques et guère sur les objectifs. Il s'agit donc de
connaître la
flexibilité de l'UÇK envers l'opinion publique. Dans le spectre de la
grande
politique, l'UÇK n'a pas de soutien, du moins n'est-il pas public.
George Robertson et Javier Solana à Skopje, pendant leur dernière
visite,
ont eu un discours désapprobateur et entièrement défavorable à l'UÇK.
L'implication de l'OTAN dans la solution du conflit en Macédoine est
désormais presque certain, mais on ignore les dispositions qui seront
prises. Cependant, on est sûr d'une chose : l'éventuelle confrontation
de
l'UÇK et de l'OTAN nuirait tout autant aux intérêts des Albanais en
Macédoine, qu'à ceux des Albanais en général, surtout en ce qui concerne
la
question du Kosovo. Quant à moi, à ce même moment, j’hésite entre le
doute
que la politique ne soit intervenue trop tard, et l'espoir que malgré
tout,
derrière les événements réside un projet sérieux appuyé par des garants
puissants, avec lesquels on ne peut pas jouer aux enfants gâtés. Quoi
qu'il
en soit, celui-ci est le dernier train pour la Macédoine.
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